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Un label, une philosophie
Retour sur le label MINT de la SCNAT
Publié en Blog, Médiation, Numérique, Politique, Suisse, UNIL le 15 février 2019 4 minute(s) de lecture
Hacker Chestel Précédent Nous/1 y sommes Suivant

Fidèle à sa devise (Un savoir en réseau au service de la société), l’Académie suisse des sciences naturelles s’est lancée dans la mise sur pied d’un label Gymnase actif dans le domaine des MINT, avec cinq objectifs en ligne de mire :

  • Promouvoir la culture MINT et soutenir la capacité d’innovation voulue par le Conseil Fédéral.
  • Encourager les gymnases à implémenter la culture MINT dans leur institution. A ce titre, il ne s’agit pas d’encourager uniquement les établissements qui se spécialisent dans les formations MINT, mais d’encourager tous les gymnases à favoriser la culture MINT, y compris ceux de sciences humaines.
  • Accompagner et valoriser les gymnases développant des projets MINT. Le label n’a pas pour but de mettre les écoles suisses en compétition, mais de distinguer les établissements qui s’engagent dans la promotion des domaines MINT.
  • Mettre en réseau les gymnases labellisés afin de créer des collaborations et construire une plateforme d’échanges MINT.ch pour toutes les écoles suisses. Typiquement en décrivant leurs expériences et les « good practices » entre les différents cantons et régions linguistiques ;
  • Soutenir les directions de l’instruction publique dans l’évolution et l’attribution de moyens pour cette nouvelle révolution post-industrielle.

Il y a quelques mois, Philippe Moreillon m’invitait à rejoindre le jury de ce label, pour représenter la dimension Sciences humaines et sociales, encore trop peu associée aux MINT. Les candidatures ont mené notre jury aux quatre coins de la Suisse et plusieurs fois à Berne, où nous avons fini par arrêter notre palmarès, qui sera prochainement rendu public.

Ces rencontres auront été l’occasion d’affiner les critères d’une culture MINT, de découvrir un nombre important de bonnes pratiques venues de toute la Suisse et de mesurer les profondes transformations survenues dans ces établissements (certes exemplaires) en matière d’enseignement de l’informatique, des mathématiques et des sciences naturelles en général.

Soyons clairs : le monde a changé. Les étudiant·e·s que nous aurons demain, sur nos bancs à l’Université, s’éloigneront de plus en plus des clivages qui, du temps de mes études, structuraient nos identités (latin-grec, scientifique). J’ai fini ma maturité à St-Maurice en 2001. Presque vingt ans diront certains. Mais vingt ans qui comptent double, triple ou davantage. Il suffit de se trouver face à des élèves qui contrastent des génomes pour s’en rendre compte. Et tout indique que la tendance va s’accélérer.

Dans le sous-sol de l’Académie des sciences, j’ai trouvé cette citation de Rosaly Sussman Yalow, Prix Nobel de chimie 1977.

Ce constat n’a jamais été réservé aux sciences naturelles. Le parchemin puis le livre ont révolutionné notre rapport aux arts et aux lettres. Croire que les nouvelles technologies n’ont qu’un faible impact sur nos pratiques et nos représentations, ce n’est pas seulement méconnaître le présent et hypothéquer le futur. C’est aussi faire preuve d’une sérieuse méconnaissance de notre histoire culturelle.

A ce titre, les stratégies retenues par la Faculté des lettres et de l’UNIL en matière d’humanités numériques sont nécessaires. N’en déplaise à certain·e·s, l’impact du numérique sur nos recherches ne se résume ni à un effet de mode, ni à une stratégie institutionnelle. Elle modifie profondément nos objets, nos méthodes et notre rapport au savoir.

Nos étudiant·e·s finiront par demander si l’on peut appliquer les méthodes du séquençage ADN aux textes littéraires. Il faut souhaiter ces demandes : un apprentissage réussi est un apprentissage transférable. Et un savoir ne peut prétendre à la scientificité que s’il connaît et documente ses limites. Cela suppose de travailler aux frontières, d’explorer les zones blanches.

Les humanités numériques déstabilisent ? Elles floutent les territoires institutionnels ? Tant pis. Tant mieux. L’humanisme scientifique est à ce prix.


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